The Cuckoo's Nest, 2011
Depuis deux décennies, l’œuvre de Susan Philipsz explore les qualités sculpturales et émotionnelles du son, et crée des résonances subtiles entre le passé et le présent. Destinée aux espaces fermés comme aux lieux de plein air, The Cuckoo’s Nest a été présentée dans le jardin du National Taiwan Museum of Fine Arts, après avoir été créée dans une pièce de la galerie Isabelle Bortolozzi à Berlin, puis installée dans le Sapporo Art Park, un jardin de sculptures de l’île d’Hokkaido, au Japon.
Six haut-parleurs disposés en cercle font entendre la voix de l’artiste et chanteuse Susan Philipsz entonnant a capella les six parties d’un madrigal anglais du XIIIe siècle, « Sumer is icumen in » – ce que l’on pourrait traduire par « l’été est arrivé ». Écrit en moyen anglais, il peut être interprété par quatre ou six voix selon la manière dont on choisit de disposer verticalement la partition originale, où les différentes parties se succèdent continûment. Figurant en cartouche, son « mode d’emploi » commence par ces mots : « Quatre compagnons peuvent chanter cette ronde mais ils ne peuvent être moins de trois. » Il s’agit d’un canon, une forme polyphonique (et contrapuntique) où la mélodie, chantée par la première voix, est ensuite imitée par les autres, chacune entrant de manière différée, jusqu’à ce qu’elles se superposent toutes. Pour The Cuckoo’s Nest, Susan Philipsz a enregistré elle-même toutes les parties et les projette sur les six haut-parleurs, chacun correspondant à une des voix du madrigal – portant ainsi le principe de l’imitation à son comble. Le texte célèbre l’arrivée de la saison nouvelle, en invitant le coucou à chanter et les bourgeons à éclore. On ignore les circonstances dans lesquelles on l’entonnait, mais il devait certainement avoir une dimension rituelle et collective. L’œuvre évoque ici une ronde dont le mouvement sonore invite au déplacement dans l’espace d’exposition.
Bastien Gallet, 2025